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La CGT Educ'action 31 soutient la

LETTRE OUVERTE DU COLLECTIF DU COLLEGE BELLEFONTAINE

POUR LE MAINTIEN DES COLLÈGES AU MIRAIL

Le lundi 1er octobre 2018, le Conseil Départemental de Haute-Garonne, ainsi que le Rectorat de l’Académie de Toulouse, ont réaffirmé auprès des personnels du collège Bellefontaine leur  volonté de maintenir la fermeture de notre établissement, dans le cadre du projet de mixité sociale entériné en janvier 2017.

A partir de la rentrée 2019, les élèves du secteur Bellefontaine seront ainsi à leur tour envoyés dans 6 différents établissements « favorisés » de l’agglomération toulousaine : les collèges Jean-Pierre Vernant, Michelet, Émile Zola à Toulouse, le collège Jules Verne à Plaisance du Touch, le collège Montesquieu à Cugnaux et le collège Labitrie à Tournefeuille.
Annoncé en grande pompe comme un projet issu d'un "dialogue citoyen", la manière dont il a été imposé montre à quel point ses promoteurs ont en réalité tourné le dos aux personnes directement concernées: parents et habitants des quartiers Bellefontaine et Reynerie, aussi bien qu'élèves et personnels de nos établissements, présents et futurs.
Si l’on ne s’oppose pas au principe de mixité sociale, nous sommes avant tout guidés par la réussite et le bien être de nos élèves. Or, loin de les favoriser, ce projet ne fait selon nous que renforcer leur stigmatisation, augmenter les obstacles à leur réussite, et ne fera qu’accentuer les difficultés de celles et ceux qui en ont le plus. Les déclarations incantatoires des autorités départementales sur les bienfaits de la mixité se heurtent à une réalité bien moins reluisante, tant les moyens font défaut, alors que les présupposés sous-jacents à cette mesure posent de sérieux problèmes.

Un contexte défavorable où tout le monde perd. Aujourd’hui, l’agglomération toulousaine connaît une explosion démographique qui n’a manifestement pas été anticipée par les autorités éducatives, ce que reconnaissait lui-même leRectorat. Cette explosion s’accompagne naturellement d’une augmentation importante du nombre de collégiens pour les années à venir.
Depuis deux ans, la mise en place du projet mixité a généré une baisse généralisée de moyens pour les établissements du département. Le Rectorat a ainsi réorienté les dotations d’une partie des collèges du département pour financer le projet du Conseil Départemental. En retour, ce manque de moyens s’est répercuté sur les collèges d’éducation prioritaire (REP et REP+). Ces établissements ont vu leurs dotations sévèrement amputées l’année dernière, au nom du principe de solidarité. La conséquence de ce jeu de chaises musicales, dans lequel tous les établissements se retrouvent perdants, a généré une incapacité d’accueil.
De nombreux établissements se retrouvent aujourd’hui saturés, certains collèges n’étant même plus en capacité d’inscrire les élèves de leurs propres secteurs (Michelet, Ponts-Jumeaux, Nougaro). Comble de l’ironie, l’un de ces collèges (Michelet) fait partie des collèges devant accueillir les élèves du secteur Bellefontaine à la rentrée 2019.

On peut légitimement s’interroger, dans un contexte qui mêle explosion démographique, saturation des effectifs et austérité budgétaire, sur le bien fondé de la fermeture de deux collèges.

Des effectifs mixtes… mais saturés.
Le Conseil Départemental a promis, pour accompagner ce projet, un maximum de 24 élèves en classe de 6e. Comment le CD peut-il garantir ces seuils, au vu du contexte de restriction budgétaire annoncé pour l’année prochaine, et de la baisse des moyens qu’elle entraîne? Va-t-on pour cela rogner davantage sur les moyens des autres établissements du département? Les collèges de l’agglomération vont-ils devoir refuser d’autres élèves de leurs secteurs ?
Mais notre inquiétude vient encore davantage du fait que dès le niveau 5e, ce seuil de 24 élèves disparaît tout bonnement, les élèves pouvant ainsi se retrouver dans des classes surchargées de 30 voire 35 élèves, comme le montre l’exemple des effectifs de certains collèges accueillant les élèves de la Reynerie.
Le Conseil Départemental rabaisse-t-il à ce point le travail des équipes, pourtant très impliquées, de nos établissements, pour imaginer que nos élèves réussiront davantage dans des classes surchargées, plutôt que dans des classes à 20 élèves, dans un établissement bénéficiant de moyens spécifiques?

Transport : encore plus d’inégalités.
Parmi les établissements proposés aux élèves du secteur Bellefontaine, certains établissements se trouvent à plus de 30 minutes. L’éloignement géographique des collèges d’accueil par rapport aux domiciles des familles est un frein évident aux apprentissages des élèves. 1h, voire 1h30 de transport dans la journée d'élèves de 6e ne peut être sans conséquences sur leur scolarité : plus de fatigue, diminution de temps libre pour les devoirs, mais également pour la pratique des activités extra-scolaires, qu’elles soient culturelles ou sportives.
La distance entre l'établissement et les familles que génère ce projet va détériorer les conditions de suivi et le lien qui peuvent être facilement entretenus aujourd’hui, fragilisant encore davantage l’implication des familles dans la scolarisation de leurs enfants.

Qui ne veut pas de la mixité ?
Pour le Conseil Départemental, si les enfants des catégories sociales les plus défavorisées réussissent moins bien que ceux issus des catégories plus favorisées, ce ne serait pas essentiellement à cause de leurs conditions d’existence et des moyens d’enseignement insuffisants qu’on leur accorde, mais parce qu'ils ne sont pas au contact des plus riches et éduqués. A la lumière de ce constat, côtoyer l'excellence serait pour le CD la seule manière de faire réussir nos élèves, une excellence auprès de laquelle il ne peuvent que s'élever. Comment imaginer que la mise en place à marche forcée d’une mixité artificielle, cantonnée à du temps scolaire, peut favoriser une plus grande réussite des élèves issus des quartiers populaires ?
L’acquisition de savoirs et de connaissances peut-elle s’opérer par magie, alors que les moyens sur place manquent cruellement? Il est fort à parier que dans de telles conditions, les inégalités ne feront que se creuser davantage, et les difficultés s'amplifieront. Cela ne semble pas constituer un problème pour le CD, tant qu'elles deviennent moins visibles, puisqu'elles seront éparpillées aux quatres coins de la ville.
On peut ajouter que ce sont très largement les familles des classes moyennes et supérieures, notamment celles les plus dotées culturellement, qui contournent la carte scolaire. À la lumière de ce constat, pourquoi force-t-on celles et ceux qui respectent la législation en terme de carte scolaire, à devoir se déplacer davantage ? Pourquoi les mesures obligatoires ne concernent-elles pas les catégories sociales les plus aisées ?

L’avenir de la SEGPA, exemple d’un mépris manifeste.
Lorsque nous demandions, en septembre 2017, ce qu’il adviendrait des deux SEGPA (section d’enseignement général et professionnel adapté) des collèges Reynerie et Bellefontaine, un des responsables du Conseil Départemental venu présenter le projet a tout simplement répondu : « nous n’y avons pas réfléchi ! ». En d’autres termes, le CD nous dit droit dans les yeux qu’il n’a pas réfléchi à l’avenir des élèves les plus en difficulté scolairement de nos établissements, puisque aucune SEGPA n'est prévue dans les futurs établissements. Il nous dit sans sourciller qu’il n’a pas réfléchi ni aux conditions de travail, ni à l’avenir professionnel d’une partie importante des collègues de nos établissements. Pour les élèves, l’absence de SEGPA dans les prochains établissements signifie deux choses : une augmentation des effectifs dans les SEGPA où seront envoyés les élèves de notre secteur, et une augmentation importante du temps de trajet pour ces mêmes élèves. Est-ce une façon digne pour le CD d’appréhender l’avenir de élèves les plus en difficulté ? Comment traduire ces réponses, sinon comme une marque de mépris, face à laquelle nous ne pouvons rester sans agir ?

Donner plus à celles et ceux qui ont moins.
Le collège Bellefontaine compte en son sein des personnels expérimentés dans le domaine de l’éducation prioritaire. Les équipes de l'établissement sont impliquées, formées, soudées et
stables. Elles sont porteuses de projets innovants, et s’impliquent dans l'aide aux élèves en difficultés grâce à différents dispositifs (tutorat, Dispositif Motivation Ambition et Réussite). Les élèves bénéficient en outre de partenariats d'excellence comme ceux du Flying Challenge (parrainages par des salariés d'AIRBUS) ou du projet DISPO (liens avec des étudiants de l'Institut d'Etudes politiques de Toulouse).
Les moyens octroyés en éducation prioritaire nous permettent de bénéficier de seuils à 20 élèves par groupe sur tous les niveaux, ce qui concourt à des conditions d’étude et de travail sereins. Les élèves bénéficient en outre d’une Association Sportive dynamique qui propose de nombreuses activités. Enfin, l’association Jeunesse Action Loisir, qui prend en charge les élèves en dehors aussi bien qu’au sein de notre établissement, ancre l'institution dans la vie du quartier et de ses nombreuses associations.

Une mesure qui contourne les problèmes.
Déplacer les élèves venant d’un milieu social défavorisé, contourner le problème de la précarité, plutôt que le combattre, en diluant les difficultés aux quatre coins de la ville, ne constitue pas selon nous une mesure politique courageuse.
Ne pas poser la problématique de la carte scolaire, des dérogations, de la fuite des élèves issus des classes aisées vers le privé, et ne pas prendre en compte la question des moyens pédagogiques et humains dans la réussite des élèves issus des classes populaires est une impasse.
La fermeture de nos deux collèges constitue en cela une mesure régressive. C’est la perte d’un service public de proximité dans un secteur où cela est fortement nécessaire. À Bellefontaine comme à la Reynerie, le collège est souvent bien plus qu’un service public d’éducation, c’est le premier relais, pour les familles en difficulté notamment, permettant d’entrer en contact avec les services sociaux des collectivités. Lorsque certains interlocuteurs font défaut, notre collège vient combler un manque et peut servir de lien privilégié pour des familles, que l'on peut conseiller ou rediriger. Il constitue un point d'ancrage et un intermédiaire entre les usagers et les organismes, médicaux et sociaux notamment. Il est un lieu essentiel qui contribue au lien social. Le collège participe de la vie culturelle et associative de tout un quartier. Sa fermeture met en péril l’existence même de nombreuses associations qui gravitent autour de lui, et par conséquent celle de la vie culturelle de ces quartiers.
Enlever un collège de son quartier, c'est entériner l'idée que partout ailleurs la présence d'un service public de proximité va de soi, mais qu'à l'inverse, dans les quartiers populaires, désertés de plus en plus par les services publics, on accepte l'accentuation de la paupérisation et de la stigmatisation en enlevant les derniers bastions de socialisation, de solidarité, d'entraide et de lien social.

Pour le maintien d’un service public de proximité !
Pour le maintien de l’éducation prioritaire !

NON À LA FERMETURE

DES COLLÈGES BELLEFONTAINE ET BADIOU !

Contact : collegesdumirailendanger@gmail.com
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Tag(s) : #Actualités-actions Education, #Éducation prioritaire, #Collèges, #Classes surchargées, #Mixité sociale, #Moyens pour l'éducation, #Mobilisations