Rassemblement stop-TAFTA
Samedi 11 octobre 14h
Square Charles de Gaulle, M° Capitole, Toulouse
Depuis mai 2014, la Commission européenne a entamé la 5e (et dernière?) phase de négociation de « l'Aire de Libre Commerce Trans-Atlantique » (Trans-Atlantic Free Trade Area – TAFTA, aussi connue sous le nom de TTIP). En 1998, un semblable accord international (AMI) avait été rejeté par la France sous la pression d'associations citoyennes et de syndicats. Pourquoi, à la CGT, sommes-nous résolument opposés à cet accord ?
D'abord parce qu'il est négocié dans un cadre absolument opaque, sans aucune consultation, ni même interpellation des citoyens. Le mandat de négociation confié à la Commission européenne par les gouvernements de l'Union européenne n'a pas été discuté, ni présenté aux peuples d'Europe, ni même devant leurs parlements nationaux. Et pour cause, le mandat devait rester secret. Prétendument pour permettre aux négociateurs européens de ne pas dévoiler toutes leurs cartes aux négociateurs états-uniens... Comment peuvent-ils nous croire si crédules ? Si la négociation devait rester secrète, c'était surtout vis-à-vis des peuples européens qui pouvaient s'animer contre ce traité.
Car le secret n'a pas été gardé pour tout le monde : les grands groupes privés européens « de la société civile » ont été consultés plus d'une centaine de fois pour l'écriture de ce mandat ! À l'inverse, ce jeudi 11 septembre, l’Initiative Citoyenne Européenne demandant l’arrêt des négociations du TAFTA et le rejet de l’accord UE-Canada (CETA) a été déclarée irrecevable par la Commission euro-péenne. L'Initiative Citoyenne Euro-péenne est pourtant un droit reconnu par le Traité de l'Union que les armadas de juristes de la Commission européenne trouveront toujours le moyen de contourner.
Le principal danger du TAFTA, comme pour la plupart des traités de commerce internationaux proposés, est justement sa volonté de confiscation démocratique : permettre aux grandes firmes privées de contourner la législation des États en créant des instances extra-nationales de règlement des conflits. En effet, les articles 23, 32 et 45 du mandat européen annoncent la création d'une juridiction de droit privé extra-territoriale (ISDS) susceptible de juger les conflits entre intérêts privés et institutions publiques. Cette juridiction serait constituée à part égale de représentants de la firme et de l’État concerné, exclurait toute référence juridique autre que le TAFTA, pas même les Constitutions des États, et ne serait susceptible d'aucun appel. Dans le cadre de l'ALENA, ce type de juridiction a condamné dans 100% des cas à des milliards d'amendes le Canada et le Mexique qui avaient cherché à limiter les activités d'entreprises pour des raisons environnementales ou sociales.
Ainsi, toute décision de politique publique, sociale, sanitaire ou environnementale pourrait être interdite si elle contrevenait à l'interprétation du Traité par ces juridictions. Le droit et la volonté publique collective seraient ainsi soumis aux intérêts commerciaux des grands groupes privés, seuls à même d'engager des procès d'une telle importance. Ainsi, par exemple, des universités privées pourraient attaquer en justice l’Éduca-tion nationale pour concurrence dé-loyale. De la maternelle au doctorat, les sociétés privées pourraient contester aux écoles, cantines scolaires et resto U, toutes subventions municipales, régio-nales ou nationales, au nom de la libre concurrence définie dans le Traité.
Dans le domaine sanitaire et environnemental, seules d'hypothétiques « preu-ves scientifiques », viendraient limiter la puissance des firmes. Mais qui ne sait que la nocivité est une question d'interprétation sociale qui ne peut passer que par le verdict démocratique.
Le TAFTA répond ainsi à la finalité absolue qui motive ce genre d'accord : l'idéologie libérale du libre échange, qui fait du commerce l'alpha et l'oméga de la vie, sans que d'autres buts puissent être imaginés et poursuivis. L'écriture même du mandat de la Commission européenne indique cette métaphysique commerciale : « Le but sera d'éliminer toutes les obligations sur le commerce bilatéral » (art.10), de « maximiser les engagements de libéralisation » (art.14)...
Pourtant le texte s'embarrasse de nombreux contre-feux censés garantir la prise en compte des niveaux de protection sécuritaires, sanitaires, environnementaux et sociaux. En réalité, seule la question de la sécurité fait l'objet d'articles précis (art. 12 et 20) qui évacuent ce champ de la compétence du traité. Les règles ou normes sanitaires ou environnementales sont souvent évoquées, mais apparaissent généralement sous l'intitulé d'« obstacles réglementaires inutiles au commerce ».
Concernant la protection de l'emploi ou des conditions de travail, rien ! Pas un article qui n'évoque explicitement la nécessité de protéger les travailleurs européens. Pas étonnant lorsqu'on connaît la politique de libéralisation menée par la Commission européenne avec les encouragements des 28 gouvernements de l'Europe dans ce domaine.
Et c'est là que les clauses de restriction à la déréglementation et les objectifs annoncés font rire jaune. Les « objectifs » ne sont annoncés qu'à l'article 7 bien après « la nature et la portée » de l'accord. Le « véritable marché transatlantique » est censé « générer de nouvelles opportunités économiques pour la création d'emplois et la croissance ». Dans le traité, le terme d'emploi n'apparaît que 5 fois. En mars 2013, la Commission chiffrait à seulement 0,5 million (pour 250 millions actuellement) à l'horizon 2027 le nombre d'emplois créés par le Traité pour l'ensemble des pays de l'Union européenne ! Autant dire que le Traité détruira des emplois en sus d'exiger le détricotage de la législation du travail. Et pas besoin de le vivre pour le savoir : aucun des traités de libéralisation commerciale de l'Union européenne n'a créé d'emplois ; l'ampleur du chômage n'a en réalité cessé de s'accroître dans l'Union européenne en même temps que l'emploi précaire et partiel explosaient. L'Union Européenne n'a aucune crédibilité sur ce sujet.
En résumé : suppression ou privatisation des services publics, destruction de la protection et de la législation sociale, soumission des normes sanitaires et environnementales aux intérêts économiques et transmission de la souveraineté nationale à des tribunaux constitués par des fifrelins des multinationales, malgré toutes les garanties affichées, le TAFTA n'aura de douceur pour les salariés que le nom. Comme souvent, l'élégance du discours permet de mieux agir avec une main de fer. Salariés d'Europe, il va falloir nous mobiliser !
Lisez et diffusez le tract du collectif Stop-TAFTA.
Retrouvez le texte et son analyse dans :
Le grand marché transatlantique : la menace sur les peuples d'Europe
de Raoul Marc Jennar, Cap Bear Editions, 2014.
et en version originale (anglais) sur
https://www.laquadrature.net/files/TAFTA%20_%20Mandate%20_%2020130617.pdf
ainsi que des analyses :
https://www.laquadrature.net/fr/tafta
http://www.monde-diplomatique.fr/dossier/GMT