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Droit de réponse au journal Le Monde pour son article du 20 juin

Au journal Le Monde

au sujet de l'article de Philippe Gagnebet

version numérique le 20 juin

et version papier le dimanche 21 juin

« Au Mirail, affrontement sur l'éducation prioritaire ».

Nous vous demandons de rectifier vos propos,

car notre collègue n’a pas à subir davantage l’opprobre et la rumeur,

alors qu’elle n’a fait que manier l’humour dans la sphère privée.

Nous qui avons suivi le mouvement social du collège de Bellefontaine depuis son démarrage, c'est-à-dire septembre 2014, souhaitons rétablir la vérité des faits concernant notre collègue accusée de « manque de respect envers sa hiérarchie ».

Nous ne reviendrons pas sur les motivations du mouvement qui sont relativement bien expliquées ; ni sur l'incompétence du Principal du collège, incapable de dialogue social et insultant à l'égard des personnels dont il a la charge ; ni sur l'acrimonie d'une mère d'élève poursuivant des ambitions politiques locales ; ni sur la fausseté et l'autoritarisme d'une Rectrice, qui, depuis le début de ce conflit, n'a toujours pas rencontré les organisations syndicales.

Nous souhaitons en effet prioritairement exercer notre droit de réponse sur les propos attribués à notre collègue, soumise le 18 juin à une commission disciplinaire appelée à donner un avis sur la sanction que veut prendre le Rectorat. Le journal Le Monde écrit : « S'il le faut, j'ai des hommes de main avec moi et on va s'occuper du cas du Principal ». Cette phrase n'a jamais existé. En outre, le contexte et la décision pénale de classement sans suite prise par le Procureur le 27 mai 2015 n'est pas mentionnée dans l'article.

La phrase exacte est une plaisanterie bourrée de points d'exclamation. On peut comprendre que le Principal ait été choqué et n'ait pas trop apprécié, mais de là à en faire une « menace de mort » et « un mail qui va mettre le feu aux poudres », il y a un ravin que des professionnels de justice, d'éducation et d'information ne peuvent franchir.

Replaçons d'abord ce mail dans son contexte. Il est écrit un vendredi soir à 23h48, depuis une boîte privée à destination d'une liste de diffusion de collègues grévistes, après deux semaines de grève éprouvantes – car une grève est toujours éprouvante contrairement à ce que pense ceux qui n'en ont jamais fait –, en réponse au mail d'une collègue indignée par le comportement du Principal du collège qu'elle accuse de « harcèlements, pressions et chantage... coutumiers » et contre lequel elle indiquait la volonté et les moyens de l'attaquer juridiquement. Notre collègue, dans la volonté de tempérer cette inflammation du conflit, répond par ce mail drolatique, dont elle a elle-même reconnu le mauvais goût dans une lettre d'excuses qu'elle a fait parvenir au Principal – qui ne lui a jamais répondu.

Ce mail n'était donc pas destiné au Principal et jamais notre collègue – et c'est peut-être là son erreur – n'a pensé qu'un des membres de la liste de diffusion composée de grévistes pourrait aller mettre ce mail sous les yeux du Principal. En outre, rien ne prouve aujourd'hui que ce mail n'a pas été récupéré illégalement, selon un système de surveillance des boîtes mails académiques, par le Principal ou le Rectorat et non par une délation comme le Rectorat aime à en faire courir la rumeur.

Non destinée au Principal, n'ayant pas l'intention manifeste d'une quelconque menace et en outre non répétée, cette galéjade n'a pas été considérée par le Parquet de Toulouse comme une preuve de « menace de mort » à l'encontre du Principal.

L'Inspecteur d'Académie lui-même a retiré cette accusation oralement le 11 mai quand notre collègue a enfin obtenu d'être entendue par une autorité hiérarchique (5 mois après la découverte du mail par le Principal, qui d'après sa plainte en a immédiatement fait part à son supérieur hiérarchique, probablement l'Inspecteur d'Académie adjoint). Le regret de cette bévue de l'Inspecteur d'Académie dans le poids et le choix des mots ne l'a pas conduit à retirer « la menace de mort » des griefs de la convocation en commission disciplinaire ; c'est au milieu de cette commission, seulement, qu'il a reconnu officiellement l'erreur et retiré les termes ; de même qu'il a retiré en plein milieu de la commission le 2e grief complètement farfelu de « mauvais positionnement institutionnel de nature à perturber gravement le fonctionnement du service public de l'éducation » qui attaquait une prise de position de notre collègue en tant que représentante des personnels. Ce qui montre à quel point cette procédure est une charge contre le mouvement social bien plus qu'un reproche individuel.

Quand à l'idée que ce mail aurait mis « le feu aux poudres », il est impossible de le prétendre et facile de démontrer le contraire. Entre le 14 décembre et le 4 mars, date à laquelle notre collègue a été convoquée au commissariat, il n'a jamais été fait mention de ce mail, ni par les collègues grévistes, ni par les autres collègues, ni par le Principal, ni par les autorités hiérarchiques, qui en avaient connaissance. Entamant la mascarade qui a continué de se dérouler jusqu'à la commission de discipline du 18 juin, le Principal a continué à saluer cordialement notre collègue comme si de rien n'était. En outre, personne n'a prolongé les discussions sur les moyens juridiques d'attaquer le Principal après la réponse guignolesque de notre collègue. En revanche, la répression à l'égard des collègues grévistes par le Principal (abandon des projets pédagogiques par le Principal, convocations personnelles, baisse des notes administratives...) s'est poursuivie, alimentant le sentiment d'injustice et d'impunité du chef d'établissement.

Qu'a fait le Rectorat pendant ce temps ? L'Inspecteur d'Académie a reçu une fois les organisations syndicales le 27 février 2015 pour leur indiquer que « les gourous de Bellefontaine signalés au Ministère » seraient dégagés du collège et énoncer la loi du Talion du Rectorat : « Si le Principal saute, au moins 5 ou 6 professeurs sauteront aussi ». Œil pour œil, dent pour dent et on voit bien le sens de l'égalité du Rectorat pour lequel un chef d'établissement incompétent et injurieux, qui met en danger, non seulement la santé psychologique et mentale de toute une équipe éducative, mais aussi la progression pédagogique de 400 élèves, avec l'appui de sa hiérarchie, vaut 5 ou 6 professeurs compétents, tous très bien notés depuis des années. Notre collègue en particulier, très impliquée dans de nombreux dispositifs contre le décrochage scolaire et très investie dans l'établissement (élue au CA, au Conseil de discipline et à l'Amicale du collège), est reconnue par ses inspecteurs comme ultra compétente dans sa classe, au point qu'il lui a été proposée de devenir directrice de SEGPA.

Qu'a fait d'autre le Rectorat ? Il a mis en place une médiation qui a servi à écrire des rapports à charge contre les collègues, rapports, qui s'appuient essentiellement sur ceux du principal, bourrés de mensonges – et pas seulement d'inexactitudes.

Le Rectorat a aussi reçu plusieurs fois (au moins 4 fois officiellement) la représentante autoproclamée des parents d'élèves, alors que la Rectrice n'a pas daigné recevoir les collègues depuis le 18 décembre (une demie-heure au cours de laquelle elle a parlé pendant 20 minutes) et n'a jamais reçu les organisations syndicales à ce sujet, malgré plusieurs demandes d'audience. Les parents de l'association « L'école et nous » affirment que le Rectorat a répondu à leur demande en excluant 6 collègues de l'établissement.

Dans leur rapport, des inspecteurs dépêchés par le Rectorat écrivent : « Les parents ont une place beaucoup trop importante dans la vie – voire le fonctionnement de l'établissement. Ils affichent une complète adhésion au Principal jusqu'à se proposer de le seconder. Un nouvel équilibre est à trouver entre participation active et cogestion actuelle [C'est nous qui soulignons]. » (Rapport de deux IPR à l'IA de Haute-Garonne du 20 mai 2015).

En s'en prenant à ces six collègues, le Rectorat enlève 6 piliers de l'établissement, souvent à l'initiative de projets pédagogiques solides. Le reste de l'équipe reste traumatisée par le comportement du Rectorat, qui a volontairement laissé pourrir la situation pour marquer les esprits et réprimer le droit d'expression des enseignants sur les réformes – prétendument pédagogiques, mais essentiellement destinées à faire des économies budgétaires – et les conditions de travail auxquelles ils sont confrontés avec leurs élèves.

Parce qu'elles auraient pu intervenir différemment, les autorités hiérarchiques sont les premières responsables de ce désastre pédagogique. Des professeurs qui défendaient les conditions d'étude de leurs élèves sont finalement lourdement sanctionnés au détriment premier de leurs élèves. Un véritable gâchis pour les élèves d'abord.

En sanctionnant les collègues – et peu importe la viabilité juridique du terme : le vécu doit à un moment primer, ce que n'a toujours pas compris la Rectrice enfermée dans sa forteresse d'où elle impose chaque jour une nouvelle expérimentation –, et en ne reconnaissant pas leur propre incapacité à construire un dialogue social et une empathie à l'égard des personnels dont ils ont la charge, la Rectrice et les Inspecteurs d'Académie sont les premiers responsables de la déréliction du collège Bellefontaine, qui ne s'en remettra pas de si tôt.

Le 21 juin 2015,

la CGT Educ'action 31.

Tag(s) : #Communiqués de Presse